L’édition 2024 du colloque annuel de l’Institut Pierre Mauroy se tiendra, cette année, le jeudi 17 octobre dans les locaux du Sénat entre 14 h 30 et 17 h 30. Intitulé « Socialistes et éducation, hier et aujourd’hui », il rappellera l’action conduite dans ce domaine par les gouvernements socialistes qui ont occupé le pouvoir depuis 1936 et il s’efforcera de présenter un certain nombre de propositions susceptibles de surmonter les nombreuses difficultés qui se font jour dans notre système éducatif depuis plusieurs années maintenant. On peut citer la question de la laïcité, la place de l’enseignement privé, le rôle de la pédagogie, le recrutement des enseignants ou encore l’individualisation de l’enseignement dans le cadre collectif…
Vous trouverez ci-dessous un texte introductif rédigé par Ghislaine Toutain, secrétaire de l’Institut et organisatrice de la manifestation, présentant le programme prévisionnel du colloque qui sera suivi, comme chaque année, d’un cocktail auquel l’ensemble des participants et des intervenants sont cordialement invités.
Nous espérons que vous serez nombreux à y assister et nous vous invitons à remplir le formulaire d’inscription ci-dessous.
Les socialistes et l’éducation, hier et aujourd’hui
Où en est l’éducation nationale quarante ans après l’abandon du projet de loi portant création d’un service public unifié et laïc de l’Education ? Le 17 juillet 1984, Pierre Mauroy, après le retrait du projet de loi porté par Alain Savary, fortement combattu par les partisans de « l’École libre », donne officiellement sa lettre de démission au président de la République et quitte Matignon, remplacé le 18 juillet par Laurent Fabius.
Cette question de l’éducation nationale constitue un point central de l’action des socialistes au pouvoir depuis 1936. Rappelons que Jean Zay, le ministre de l’Éducation et des Beaux-Arts du Front populaire, relève l’obligation scolaire de treize à quatorze ans, met en place la réforme des trois degrés d’enseignement, l’unification des programmes, les classes d’orientation, le sport à l’école, l’éducation artistique et culturelle et l’ouverture de l’accès à l’université au plus grand nombre. On voit que sont posés là les fondamentaux de l’éducation populaire dont se nourriront Pierre Mauroy et ses amis lorsqu’ils créeront, en 1950, la Fédération Léo Lagrange. La création du CEDEP en 1966, que Pierre Mauroy définit comme un « mouvement d’éducation populaire à caractère civique et politique », s’inscrit dans le prolongement de la Fédération et vise, à l’origine, à concilier éducation populaire et politique partisane.
Au lendemain de la guerre, les propositions de plan Langevin-Wallon de 1947, qui ne seront appliquées que progressivement, vont fortement inspirer toutes les réformes en matière éducative de la seconde partie du XXe siècle. Il prévoit notamment l’école obligatoire jusqu’à dix-huit ans (seize ans en 1967), un tronc commun pour les élèves de onze à quinze ans par l’unification des programmes des cours complémentaires, des collèges et des lycées. Le collège unique de la réforme Haby en 1975 s’inspirera de cette doctrine.
Toutefois ces avancées n’ont pas conduit à une réduction suffisante des inégalités scolaires. Quand la gauche arrive au pouvoir en 1981, l’éducation est une priorité pour la nouvelle majorité. « C’est la jeunesse qui fonde l’avenir », affirme Pierre Mauroy, ancien professeur de l’enseignement technique, ancien militant et responsable dans le syndicalisme enseignant, dans un discours du 16 octobre 1982 à Lille. Alain Savary est nommé à la tête d’un grand ministère de l’Éducation nationale et engage d’importantes réformes et innovations scolaires comme la création des ZEP, le renforcement de la formation des enseignants, la massification des lycées et la réforme du collège unique (qui ne sera appliquée que partiellement), basées sur l’aménagement des temps de travail en groupes d’élèves de niveau hétérogène pour les 6e et 5e, disposition que le Premier ministre actuel, Gabriel Attal, entend à son tour, mettre en œuvre.
C’est sur le projet de loi d’Alain Savary de 1984 prévoyant la création d’un grand service public unifié et laïque de l’éducation nationale intégrant l’école privée que les différences d’approche entre Pierre Mauroy et François Mitterrand apparaîtront au grand jour sur ce sujet, le président de la République étant plus prudent sur la question de la laïcité. La suite est connue. Face à l’importance de la manifestation des partisans de l’école privée, François Mitterrand retirera le projet de loi. Alain Savary démissionnera, entraînant la démission de Pierre Mauroy et son départ de Matignon.
Les ministres de l’Éducation nationale qui se succéderont sous les gouvernements de gauche qui ont suivi, de Jean-Pierre Chevènement à Najat Vallaud-Belkacem en passant par Lionel Jospin, Jack Lang, Claude Allègre, Vincent Peillon et Benoît Hamon, ont tous cherché à redresser, voire refonder le système éducatif français pour redonner confiance dans l’école publique et donner à tous les élèves les mêmes chances de réussite. Rappelons particulièrement la loi Jospin de 1989 qui a modifié le fonctionnement du système éducatif, réorganisant notamment la scolarité en cycles et en créant les UIFM.
Aujourd’hui, alors que l’on constate chaque jour les difficultés croissantes rencontrées par le système éducatif, notamment sur la laïcité, l’importance prise par l’enseignement privé confessionnel au détriment de l’enseignement public et la difficile situation des enseignants, confrontés à une violence certaine (on pense, bien sûr à Samuel Paty et à Dominique Bernard), ne faudrait-il pas établir un nouveau plan Langevin-Wallon qui repense le système éducatif dans sa globalité, en prenant en compte les enjeux contemporains ? Il s’agit d’ouvrir des perspectives sans laisser de côté les sujets problématiques, comme la question de l’enseignement privé, la place de la pédagogie, la formation et le recrutement des enseignants, l’individualisation de l’enseignement dans le cadre collectif.
L’impératif est de redonner une boussole à toutes les actrices et tous les acteurs, que ce soient les personnels de l’Éducation nationale, les futurs enseignants, les élèves et les parents d’élèves. Cette question doit être au cœur des préoccupations d’une social-démocratie renouvelée, qui considère, comme le faisait Pierre Mauroy, que la question de l’éducation est au cœur – et a toujours été – au cœur de l’action des socialistes pour la justice sociale et l’émancipation individuelle et collective.
Programme prévisionnel
Accueil : Patrick Kanner, sénateur du Nord, président du groupe socialiste, écologiste et républicain
Modérateur : Bernard Derosier, co-président de l’IPM
Introduction générale : Bernard Toulemonde, conseiller Éducation au cabinet de P. Mauroy,
Intervenants : Jean-Paul Delahaye, membre des cabinets de Jack Lang et Vincent Peillon à l’Éducation nationale, Benoît Kermoal, UNSA Éducation, Colombe Brossel, secrétaire de la commission de la culture, de l’éducation, de la communication et du sport du Sénat, Ernst Stetter, ancien secrétaire général de la FEPS.
Intervenant de la salle : Yannick Trigance, responsable Éducation au Parti socialiste
Conclusion : Patrick Bloche, adjoint à la maire de Paris chargé de l’Éducation