Il y a 40 ans, le 21 mai 1981… par Lyne Cohen-Solal


« Gouverner ne se résume pas à produire des lois et des règlements. Il faut aussi-et peut être avant tout-une volonté politique, de l’ardeur et certainement des sentiments »

Pierre Mauroy. C’est ici le chemin, 1982

L’anniversaire des quarante ans de l’arrivée de la gauche au pouvoir avec l’élection de François Mitterrand le 10 mai 1981 nous permet de rappeler la date moins populaire mais politiquement essentielle, celle du 21 mai 1981. Celle de la prise de fonctions du premier président de gauche de la Ve République et celle du premier gouvernement de son septennat dirigé par Pierre Mauroy.

Nommé Premier ministre en fin de matinée, cette journée-là, la haute silhouette de Pierre Mauroy participe à la cérémonie du Panthéon avant de gagner l’Hôtel de Matignon pour préparer le travail, organiser son cabinet et former avec le nouveau Président leur premier gouvernement. « Un nouveau départ dans sa vie, écrit Mauroy dans ses Mémoires, comme “la possibilité d’avoir à remplir pour la gauche une belle et très grande page vierge”

Pierre Mauroy première allocution de premier ministre
Pierre Mauroy prononce sa première allocution de Premier ministre sur le perron de Matignon le 21 mai 1981. Crédit : Fondation Jean-Jaurès

À cette occasion, l’Institut Pierre Mauroy vous propose un ensemble de documents :

  • L’intégralité du texte du livre devenu un repère sur la vie de nos institutions : “La vie quotidienne à Matignon au temps de l’union de la gauche” écrit par notre ami Thierry Pfister et publié chez Hachette en 1986.

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  • La présentation du projet, de la conception de cet ouvrage comme de son élaboration, une mise en perspective quarante ans plus tard de la conception de la communication politique, texte inédit de Thierry Pfister.

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  • Une vingtaine de témoignages inédits (présentés selon l’ordre alphabétique du nom de leurs auteurs) concernant cette période vécue et racontée par des membres des différents cabinets de Pierre Mauroy.

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  • Le rappel de l’ouvrage Pierre Mauroy, une passion politique, recueil de photos commentées par Lyne Cohen-Solal et Ghislaine Toutain, sorti début 2020 aux éditions Hémisphères, disponible en librairie ou sur commande à l’Institut.

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Nous souhaitons ainsi montrer comment ce qui reste dans la mémoire des Français comme l’œuvre de la Gauche au pouvoir, c’est-à-dire les avancées sociales, sociétales et culturelles des 110 propositions du programme, ont été mises sur le métier immédiatement. La dissolution de l’Assemblée nationale et l’élection d’une majorité absolue remportée par la gauche en juin ont permis au deuxième gouvernement de Pierre Mauroy, composé de socialistes, de quatre ministres communistes de se mettre au travail dès l’été. Après 23 années sans alternance de politique d’une droite conservatrice, 13 ans après les manifestations d’impatience de la jeunesse de mai 1968, la France avait un ardent besoin de changement ! “Changer la vie” a été un programme politique majeur et a pu répondre à nombre de ces exigences grâce à l’action du couple Président-Premier ministre qui s’était préparé au pouvoir depuis plus d’un un an et dont la complicité n’a jamais été prise en défaut. Ces deux hommes qui formaient la tête de l’exécutif ont su se servir de la Constitution mise en place par de Gaulle et la faire fonctionner sans la bousculer pour apporter à la France des réformes en profondeur sans heurts majeurs pour les Français.

Il est en effet remarquable de constater combien François Mitterrand et Pierre Mauroy aux personnalités et aux parcours si différents, ont su, en se complétant, faire parfaitement fonctionner nos institutions. L’un venait de la bourgeoisie provinciale catholique et des clubs de pensée radicaux, l’autre d’un vieux parti ouvrier et des corons du Nord industriel. L’un présidait à l’Élysée, l’autre gouvernait à Matignon tout en échangeant sans cesse et en se faisant une grande confiance sur l’essentiel.

Quarante ans plus tard, à un an de la présidentielle de 2022, qui se présente périlleusement pour la gauche, avec un risque réel de voir l’extrême droite l’emporter, nombre de débats se concentrent sur l’unité des forces de gauche et sur nos institutions. Devons-nous rappeler qu’avant le 10 mai 1981, il y eut en mai 1969 le congrès d’Alfortville avec la naissance du Parti Socialiste, en juin 1971 le Congrès d’unification d’Epinay, en juin 1972 à Paris, l’adoption du Programme commun de gouvernement avec le Parti Communiste et, en avril 1979, le congrès de Metz avant les 110 propositions ? Autant d’étapes de cette marche vers le pouvoir où l’on retrouve la marque et l’œuvre patiente de Pierre Mauroy.

D’autres débats, tout aussi passionnants dans cette société malmenée par la pandémie du coronavirus, tiraillée par l’individualisme et l’usage tyrannique des réseaux sociaux, s’engagent sur les institutions. Héritées de 1958, il y a plus de 60 ans, partiellement revues, amendées, américanisées, doivent-elles être refondées pour une VIe République ou simplement rénovées pour répondre aux besoins de la France du début du XXIe siècle ?