Daniel Boucher


« Un souvenir émouvant d’Argentine »

Daniel Boucher

Lors de la prise de fonction de Raoul Alfonsin, en 1983, à Buenos Aires, Antoine Blanca accompagnait Pierre Mauroy. La cérémonie de passation de pouvoir entre les généraux et le nouveau président a été réduite. Le Premier Ministre et sa suite sont de retour à l’hôtel plus tôt que prévu.

J’étais en charge des transmissions du PM. J’ai retrouvé à Buenos Aires, mon grand-père maternel, italien émigré en 1930, que je n’avais pas revu depuis 1951… Il était avec moi, dans ma chambre qui servait de centre de transmission, lorsque Pierre Mauroy est venu pour prendre connaissance des messages. Je lui ai présenté mon grand-père et je lui ai raconté succinctement son histoire.
Pierre Mauroy s’est assis sur mon lit, à côté de mon grand-père, Antoine Blanca, servant d’interprète. Ils sont ainsi restés plus d’une heure à discuter… de l’italien qui avait fui le fascisme en 1930, de l’immigré qu’il était, de sa vie en Argentine… Imaginez ce qui a pu se passer dans la tête et le cœur de mon aïeul, revoir son petit-fils, qui avait un peu changé en 32 ans, mais plus encore parler longuement avec le Premier ministre de la France. Il a vécu un moment exceptionnel et souvent, jusqu’à sa disparition, il a rappelé ce temps fort où il a pu discuter avec Pierre par l’intermédiaire d’Antoine. Souvenir émouvant pour moi.

Bien sûr, j’ai vécu aux côtes de Pierre Mauroy à Matignon d’autres moments sympathiques ou plus ou moins tendus, comme la « spaguettade » proposée par la femme de l’ambassadeur de France en Argentine quand il s’est agi de définir le menu du repas que le Premier ministre voulait offrir lors de ce voyage. Mais les retrouvailles avec mon grand-père et les moments qu’il a passés avec Pierre restent pour moi le meilleur souvenir.